Ce billet tente d’expliquer les enjeux de la production d’Ethanol combustible qui est en passe de devenir un secteur d’activité économique important à Madagascar. Le Salon de l’énergie qui s’est tenu au Carlton Anosy les 04, 05 et 06 novembre 2015 a d’ailleurs vu la participation de quelques promoteurs de ce type de combustible.
Une transition énergétique incontournable
Tout le monde est actuellement unanime sur le fait que le pays doit s’engager petit à petit vers une transition énergétique, en privilégiant l’utilisation de l’énergie renouvelable. C’est dans ce contexte que l’idée de production d’éthanol à usage domestique est plus qu’important. Ce concept intéresse déjà l’Etat Malagasy qui a mis en place un «Programme National Ethanol Combustible».
Des initiatives privées sont déjà en cours de développement pour la production d’éthanol combustible. Le cas le plus connu actuellement est l’unité de fabrication d’éthanol de Madagascar Energy Company (M.E.C), une entreprise 100% malgache qui s’est installée dans la Commune Rurale de Ranomafana Est, avec une capacité de production moyenne de 1500 à 2000 litres par jour (voir ici). Outre ses propres champs de culture de canne à sucre, d’autres planteurs dans sa Région d’implantation approvisionnent également cette unité. L’éthanol produit est mélangé avec un peu de colorant pour le rendre inconsommable.
Une autre société appelée OBIO HAMY a été créée par trois jeunes malgaches en étroite collaboration avec des paysans producteurs de manioc. En effet, OBIO HAMY utilise le manioc comme matière première au lieu et place de la canne à sucre. Une idée que je trouve particulièrement intéressante dans la mesure où le projet s’installe sur les hautes terres qui sont plutôt favorables à ce type de culture. L’éthanol est ici vendu sous forme de gel le rendant également inconsommable, et il est destiné uniquement aux ménages qui achètent les réchauds importés par OBIO HAMY.
Ethanol domestique et lutte contre la déforestation
Les cultures itinérantes sur brûlis et les feux de brousse sont les premières causes de pertes des forêts malgaches. Ces activités accélèrent en même temps le phénomène d’érosion d’autant plus que les initiatives de reboisement sont très limitées, n’arrivant pas à compenser la dégradation des forêts, vu la faiblesse des moyens humains, matériels et financiers déployés.
Parallèlement, l’utilisation de bois comme énergie de cuisson (bois de chauffe et charbon de bois) par pratiquement plus de 90% des ménages malgaches constitue un autre facteur explicatif de cette grande déperdition forestière. En ce qui concerne le charbon de bois dont la consommation est particulièrement très élevée pour les ménages vivant en milieu urbain, il provient de trois sources principales, à savoir : l’exploitation des formations naturelles, les plantations forestières paysannes, et les plantations industrielles de Fanalamanga. La consommation totale de charbon de bois est estimée à 402.000 Tonnes en 2012 selon le WWF dans le document intitulé « diagnostic du secteur énergie à Madagascar ».
La production d’éthanol combinée à la diffusion de foyer à éthanol pour usage domestique constitue une alternative très intéressante à cette utilisation de bois énergie. D’autant plus que la croissance démographique et corollairement des besoins énergétiques exige de nouvelles sources d’énergie pour éviter la disparition totale des ressources forestières à Madagascar. Le développement du combustible éthanol domestique entraînera non seulement la réduction de l’utilisation de charbon de bois et du bois de chauffe mais en même temps atténuera les émissions de gaz à effet de serre par le maintien du couvert forestier existant.
Ainsi, sur le plan environnemental au niveau national, une baisse progressive de l’exploitation forestière à des fins énergétiques peut être attendue. Cela va impacter dans une certaine voire large mesure sur la déforestation. De ce fait, la forêt malgache continuera à stocker le carbone dont la vente auprès des bailleurs de fonds et/ou des grands organismes internationaux constitue également un autre enjeu non négligeable pour le développement socio-économique local.
Ethanol domestique et avantages socio-économiques
Les bénéficiaires directs et indirects d’un tel Projet, sont nombreux : (i) les ménages, utilisateurs finaux du foyer à combustion éthanol, dont les bénéfices directs sont l’amélioration de la santé et la réduction de la consommation en charbon ; (ii) les producteurs et les revendeurs de l’éthanol, grâce au profit économique de l’activité ; (iii) les planteurs des matières premières (canne à sucre ou manioc), par l’amélioration, voire la stabilité de leurs revenus ; (iv) les employés dans les unités de micro-distillerie qui sont essentiellement recrutées localement; (v) les collectivités décentralisées (fokontany et commune) où sont implantées les unités de production grâce aux ristournes conformément à la Loi 2013-013 sur la production et la commercialisation de l’Ethanol Combustible; (vi) divers autres acteurs économiques impliqués dans ce secteur d’activité.
A l’échelle régionale et nationale, cela devra ainsi permettre la création de nombreux emplois, tant au sein des unités micro-industrielles que dans les champs de plantations des matières premières pour la fabrication de l’éthanol, ainsi qu’au niveau des distributeurs/revendeurs. L’existence de la micro-distillerie constitue bien évidemment une aubaine pour les populations locales, notamment en cette période difficile où la recherche d’emploi devient un vrai parcours du combattant. Il s’agit donc d’une source de revenu plus ou moins permanente pour ces familles.
Au niveau du ménage utilisateur, un littre d’éthanol qui s’achète à 3000 ariary permet une cuisson variant de 5 à 8 heures. L’éthanol est plus économique que le gaz mais coûte encore un peu plus cher que le charbon de bois. Mais comme l’expansion de l’activité devra se faire de manière progressive, les prix respectifs du foyer, aussi bien du combustible tendraient à diminuer graduellement, par rapport à la situation au démarrage, grâce à l’économie d’échelle. Cependant, plusieurs autres avantages peuvent être déjà cités, si l’on fait une évaluation rapide de l’usage de l’éthanol en comparaison avec ces combustibles solides. Tout d’abord, il y a l’absence de salissure, due à l’absence de résidus. En outre, l’éthanol brûlé est un des gaz les moins polluants (il libère 92% moins de gaz carbonique que l’essence). Eu égard à ces caractéristiques, l’usage de l’éthanol combustible réduirait les maladies respiratoires chez un ménage qui habituellement consomme du charbon de bois et du bois de chauffe.
Des risques à prendre en compte
Malgré ces avantages qui ne sont pas du tout négligeables aussi bien sur le plan environnemental que socio-économique, il est notoire que les risques et impacts négatifs éventuels d’un tel projet sont nombreux et à prendre en compte. Ces risques peuvent se présenter à différentes echelles allant de la plantation des matières premières jusqu’au niveau des ménages utilisateurs finaux en passant par les unités de fabrication de l’éthanol.
En ce qui concerne les micro-distilleries, la vinasse, qui est le résidu de la distillation a un fort pouvoir polluant. Compte tenu des produits utilisés lors de la phase de préparation du jus de canne avant la fermentation, sa principale composition est constituée d’éléments minéraux dont un élément indésirable dans l’eau destinée à la consommation, à savoir le nitrite. La pollution peut également reposer sur sa forte Demande Chimique en Oxygène (DCO). La production d’éthanol à travers l’utilisation des chaudières peut aussi avoir des répercussions sur la qualité de l’air sans oublier la quantité de bois nécessaire pour leur fonctionnement. Dans le cas de canne à sucre, la bagasse peut facilement substituer l’emploi du bois pour les chaudières.
Parmi les risques à craindre au niveau des plantations figurent l’augmentation des défrichements suite à la recherche de nouveaux champs de culture de canne à sucre et le risque de pollution des eaux et des sols suite à d’éventuels usages abusifs de pesticides ou d’autres produits chimiques auxquels les paysans pourraient avoir recours pour l’augmentation de leur rendement.
Au niveau des ménages utilisateurs, les risques de brûlures, d’incendie domestique et d’intoxication sont les plus à craindre. Le risque de consommation de l’éthanol est faible au niveau des utilisateurs finaux étant donné que le produit est déjà soit coloré, soit gélifié comme indiqué précédemment. Par contre, ce risque démeure assez élevé pour les employés des micro-distilleries.
Pour conclure, optimiser les avantages et atténuer les risques
L’enjeu de la production du combustible domestique éthanol à Madagascar est multiple : économique, écologique, social, local, régional et national. En effet, la mise en œuvre d’un Projet de développement de ce combustible représente un défi de taille pour Madagascar, notamment pour le secteur de l’environnement et pour le secteur industriel : le défi de préserver durablement les forêts tropicales, le défi de réduire le taux de mortalité dû à l’usage de charbon, le défi de promouvoir les filières de canne à sucre et de manioc, enfin le défi de réduire la pauvreté en milieu rural.
Cependant, l’analyse des impacts négatifs éventuels d’un tel projet n’est pas à négliger et des mesures d’atténuation ou d’évitement sont à prévoir par tous les promoteurs. Enfin, de nombreuses directives sont à formuler pour les planteurs, les unités de fabrication d’éthanol, les distributeurs/revendeurs et les ménages utilisateurs.
Ce que vous avez fait m’intéresse. Donc j’aimerais vous contacter directement par téléphone si possible. Je travaille avec plus de 2500 producteurs et j’aimerais leur aider à l’utilisation d’éthanol dans leur vie quotidien.
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Voici mon numéro 0341304446
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La production de Biodiesel me semble plus avantageux car elle évite la consommation de bois et autres pour distiller l’éthanol, l’auto-consommation et le trafic du « toaka gasy », le danger de brûlure et surtout l’accaparement de sols de qualité nécessaire à la canne à sucre et au manioc avec l’abus de fertilisation polluante pour obtenir de gros rendements. Des technologies simples ont été mis au point pour des micro-usines pouvant être gérées par une petite coopérative ou même des « personnes isolées dans une ferme ou autre entité (commune, ;…). Des fourneaux existent depuis longtemps fonctionnant au pétrole qui sera remplacé par un produit non importé et son utilisation pour les camions diesel sera facilitée et économiquement moins dépendante de l’importation. Les plantes utilisables et de type oléagineux sont arbustives et pérennes donc utiles pour le reboisement et n’exigeant pas de sols fertiles.
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Merci pour votre commentaire et de votre visite sur le blog. Dans cet article j’ai choisi de parler uniquement de l’éthanol car c’est déjà en cours de production à Mcar. Un autre article sur le biodesel viendra peut être plus tard si une usine de production de ce type de combustible vient s’installer au pays.
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