Le raphia, la plante la plus utile à Madagascar ?

Le raphia, la plante la plus utile à Madagascar ?

Si vous êtes un lecteur assidu de ce blog, vous aurez pu remarquer que j’ai changé l’ancienne rubrique « Social & Economie » en une nouvelle rubrique intitulée « Environnement & Développement ». Vous trouverez surtout dans cette nouvelle catégorie des articles liés à la valorisation des ressources naturelles qui devrait contribuer à la fois au développement socio-économique et à la préservation de l’environnement à Madagascar.

L’on ne cesse de répéter que Madagascar est très connu pour sa richesse en biodiversité mais aussi pour certains produits d’exportation comme la vanille, le cacao et le girofle. Les produits artisanaux font également partie des grandes fiertés de Madagascar dans le monde mais les matières premières pour les fabriquer restent bizarrement moins connues. C’est le cas du raphia qui pourtant peut être considéré comme l’espèce floristique la plus utile de la Grande île. Et vous saurez pourquoi en lisant ce billet.

Le raphia, une plante à usage multiple

Le grand palmier appartenant à la famille des Arecaceae est une  espèce floristique éparpillée dans les régions côtières de Madagascar. Le raphia désigne à la fois l’arbre et les fibres obtenues à partir de l’enveloppe de ses folioles. S’établissant essentiellement dans les zones marécageuses, les raphias constituent le plus souvent une ceinture qui longe les fleuves et les lacs, mais aussi dans des vases ou des marécages périodiquement asséchées et inondées.

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Etant monocarpique, le raphia fleurit une seule fois au moment où il atteint son développement maximal, soit au bout d’une quinzaine d’années. La plante meurt ensuite après que les fruits issus de cette floraison sont murs. A l’âge adulte, le raphia est gigantesque pouvant mesurer plus de 20 m de hauteur. Sa particularité réside dans le fait que toutes les parties de la plante sont utilisées par les populations locales comme l’illustre l’image suivante.

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Les pétioles ou rachis sont employés pour la construction des cases d’habitation traditionnelles, voire pour constituer des montants d’échelles. Le bourgeon terminal est comestible pour l’alimentation humaine et parfois animale. La sève du tronc sert à fabriquer le vin de palme et est transformé en alcool pour tout événement festif. Les fruits sont utilisés comme médicaments ou pour la fabrication d’huile.

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Les feuilles permettent de réaliser le revêtement de la toiture de cases d’habitation ou tout autre type d’habitat. Tandis que c’est la face intérieure des feuilles, lorsqu’elles sont battues et séchées qui donne les matières utilisées pour la fabrication des nasses de pêche.

Les jeunes pétioles sont exclusivement récoltés pour donner les fibres de raphia, lesquelles servent à la fabrication des ustensiles de la vie quotidienne tels que panier, chapeau, tapis, sets de table, porte-monnaie, ou pour les coutures sur les produits à base de « satrana » (les nattes ou tsihy, les paniers, etc.).

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Le raphia, un produit d’exportation

La chaine de valeurs de raphia à Madagascar se compose de cinq grands segments, à savoir : la récolte, la transformation en fibres de raphia et en panneaux, la commercialisation aux intermédiaires, l’exportation et/ou la vente aux artisans. Cette filière fait ainsi vivre un nombre très considérable de ménages malgaches.

Tous les produits et sous-produits sont commercialisables mais c’est la fibre du raphia qui est surtout exportée. L’exploitation du raphia est très ancienne, datant de l’époque de la colonisation. L’année 1928 constituait l’âge d’or pour tous les acteurs du raphia où la quantité exportée avoisinait les 10000 tonnes (chiffre record d’exportation).

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Elle engendrerait encore actuellement une rentrée de devises annuelle de plusieurs milliards d’ariary. Les exploitants locaux dans les villages proches des concessions et des plantations de raphia conservent leurs connaissances, leur savoir-faire et leurs technicités traditionnelles dans la manipulation des plantes pour obtenir les fibres de qualité.

Le raphia exporté est essentiellement utilisé en viticulture, horticulture et arboriculture comme lien pour le tuteurage et le greffage ou de matières premières pour la confection d’objets de sparterie. Les principaux clients de Madagascar sont constitués par la France, le Maroc, l’Egypte, l’Allemagne, l’Inde, la Turquie, le Hong-Kong, l’Arabie Saoudite, Mexique et récemment la Chine. Les produits peuvent être retravaillés en fonction des commandes spécifiques des clients importateurs: coloration (utilisation des colorants basiques ou acides), mise en forme (raphia floche, raphia pelote), emballage.

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Des produits artisanaux fabriqués totalement ou partiellement à l’aide de fibres de raphia sont également exportés en quantité plus ou moins importante dans plusieurs pays du monde. Pour cela, cette matière première ne subit pas forcement de grande transformation, à l’exception de la teinte ou de la coloration. Certains artisans nationaux ne manquent pas de créativité et d’originalité pour mettre en valeur leurs produits artisanaux, lesquels sont vendus sur des marchés à l’étranger comme en Allemagne (crédit : Kunst-Koerbe.de).

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Une filière malheureusement en déclin

On assiste actuellement au désintéressement de la population rurale à l’activité d’exploitation du raphia, à cause de la diminution progressive des revenus obtenus, mais aussi en contrepartie, en raison des efforts physiques requis pour la récolte des pétioles et des feuilles. En conséquence, une grande partie des plantations de raphia sont transformées en parcelles de rizières, où se dressent encore avec grandeur, quelques arbres jusqu’à ce qu’ils meurent.

Le constat depuis quelques années montre un déclin voire une dégradation alarmante de la ressource raphia. Des menaces et pressions s’exercent sur la ressource comme la transformation des forêts de raphières en rizières, la surexploitation de la ressource, l’insuffisance des contrôles administratifs et le manque de sensibilisation pour la population sur la préservation et l’exploitation rationnelle de la ressource.

raphia5_blog_rasamyCertains projets environnementaux comme le PAGE/GIZ et ASITY Madagascar mettent actuellement en oeuvre des activités spécifiques pour le développement de la chaine de valeurs raphia dans les zones de concentration de raphia à Madagascar. Ils lancent à titre d’exemple des programmes de restauration et de développement de la filière raphia  en collaboration étroite avec les communautés de base et les autorités locales.

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