Ce qu’il faut savoir sur le Lac Mandroseza

Ce qu’il faut savoir sur le Lac Mandroseza

Ce billet a pour principaux objectifs, d’une part d’expliquer à mes lecteurs le processus de production d’eau potable par la société JIRAMA dans la ville d’Antananarivo et ses zones périphériques depuis le grand réservoir de Tsiazompaniry en amont jusqu’à la distribution au niveau des ménages en aval, en passant par le bassin de décantation et l’usine à Mandroseza. D’autre part, il vise à conscientiser tant les autorités à tous les niveaux que l’ensemble de la population sur l’importance de la protection des infrastructures et de la préservation du milieu naturel qui assurent la production de cette précieuse ressource.

Du réservoir de Tsiazompaniry jusqu’au Lac Mandroseza

Le site de production d’eau potable de la JIRAMA est localisé à Mandroseza dans la Commune Urbaine d’Antananarivo. Il alimente cette dernière et les zones d’extension urbaine dans un rayon de 15 Km. Le site exploite le lac Mandroseza, un bassin de décantation d’une superficie de 40 ha et de volume estimé à 800 000 m3, qui est alimenté par la rivière Ikopa à travers un barrage de prélèvement avec des systèmes de pompage constitués par 5 pompes.

La première source naturelle en amont de Mandroseza est le Lac réservoir de Tsiazompaniry qui a été aménagé en 1955. Tsiazompaniry est équipé de deux barrages à voûtes multiples et à contreforts construits aux droits de la rivière Varahina Sud et son affluent, la Manandriana. Il fait partie de l’aménagement hydraulique du bassin supérieur de l’Ikopa.

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Antananarivo est ensuite alimentée par les eaux de l’Ikopa qui transitent dans le lac Mandroseza avant d’être traitées puis refoulées par pompage vers les réservoirs dans les villes basses. Pour atteindre les villes hautes, l’eau est reprise par surpression. L’alimentation se fait soit par des branchements particuliers, soit par des bornes fontaines publiques.

La moyenne journalière de la quantité d’eau prélevée par la JIRAMA pour l’agglomération de la capitale est de 192 000 m3 actuellement (pendant le 1er trimestre de l’année 2017). Le débit de pompage de l’eau de l’Ikopa vers le lac Mandroseza est variable, il se situerait entre 6 000 m3/h et 8 800 m3/h. En effet, la capacité du lac et la variabilité de la consommation ne permettent pas de maintenir un débit de pompage fixe. Aussi, le temps de fonctionnement des pompes est variable.

Les infrastructures de l’usine de production d’eau potable de Mandroseza se situent au Nord-ouest du Lac du même nom. Elle abrite un bon nombre de bâtiments et d’infrastructures plus ou moins anciennes ainsi que des zones récréatives et de fonction sociale pour le personnel

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Du Lac Mandroseza jusqu’aux ménages

L’eau brute issue du lac Mandroseza subit trois principales phases bien distinctes : la phase de clarification qui est un traitement physico-chimique, la phase de stérilisation où il y a traitement bactériologique, et enfin la phase de neutralisation.

La JIRAMA dispose dans son usine à Mandroseza trois (03) stations de traitement : celle de Mandroseza I qui a été installée depuis 1927 ; celle de Mandroseza II, construite en 1991 et mise en service en 1993 ; celle de Mandroseza II bis dont les travaux de construction viennent de se terminer en cette année 2017.

mandroseza

L’usine de traitement des eaux de Mandroseza assure en majorité l’alimentation en eau potable de la ville d’Antananarivo et de certaines zones périphériques. L’eau consommée au niveau des abonnés/consommateurs transite par 32 réservoirs éparpillés dans toute la ville. Certains réservoirs sont liés entre eux. Dix (10) suppresseurs sont installés pour augmenter la pression.

Depuis 1982, quatre autres stations ont été créées pour surtout desservir les zones périphériques, à savoir à Vontovorona, Faralaza, Sabotsy Namehana et Ankadivoribe. La répartition géographique du réseau de distribution pour Antananarivo est subdivisée en huit grandes zones. Seul réseau de Vontovorona est indépendant et n’est pas connecté aux réseaux Grand Tanà.

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Lac Mandroseza, menacé par une urbanisation sauvage?

Le Lac Mandroseza, en tant que source de captage des eaux potables à grande échelle, est classé « zone sensible ». En conséquence, il doit être instauré par voie réglementaire le périmètre de protection du Lac de Mandroseza du fait de son caractère tant particulier que stratégique.

Des documents font également mention de la délimitation au niveau de l’Ikopa des zones de protection immédiates sur 25 m des deux rives juste avant le barrage jusqu’au pont d’Ambohimanambola. On cite par ailleurs l’interdiction de toutes activités sur le bas fond où la nappe est à un niveau statique de 0 à 1m, protection rapprochée sur toute la zone où la nappe est entre 1 à 5m, où les activités doivent être réglementées.

Depuis les années 1990, le bassin versant de Mandroseza connaît toutefois une augmentation importante de son urbanisation. La surface urbanisée est par exemple passée de 30.95 Ha en 2002 à 53.65 Ha en 2016 (Image: situation 2016).

mandroseza_2016

Comme principale cause est l’absence de protection particulière (physique) de la zone. De l’autre côté, sur le plan foncier, les terrains se trouvant sur les flancs, relèvent en grande partie de la propriété privée ce qui a rendu difficile l’interdiction de construction de bâti. Les zones à proximité immédiate du Lac Mandroseza sont constituées par les fokontany situés autour du site : Fokontany de Mandroseza Cité, Fokontany Andohan’i Mandroseza, Fokontany Ambohimiandra, Fokontany Ambatoroka.

Cette urbanisation sauvage se traduit par la création des réseaux d’assainissement, plus ou moins unitaires, en souterrain. Les eaux usées et les eaux pluviales des habitations sur les flancs Nord et Ouest sont conduits directement dans le lac. Ce qui peut avoir des conséquences sur les écosystèmes du lac.

Actuellement, le bassin Nord-Ouest est complètement urbanisé en aval dans la mesure où la vue sur le lac est un critère recherché qui fait augmenter les enchères du foncier. On aperçoit par ailleurs des champs de culture qui tendent à devenir disséminés à cause des nouvelles constructions qui poussent. Sur les berges du lac, des superficies sont transformées en terrain de culture, notamment des cultures maraîchères comme les brèdes, haricot, salades et autres ainsi que des cultures de taro.

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Lac Mandroseza, menacé par l’envasement ?

Compte tenu de la vétusté des infrastructures de production d’eau de la JIRAMA, des problèmes d’approvisionnement en eau potable de la ville d’Antananarivo ne cessent de se manifester, comme la destruction des tuyaux d’adduction d’eau, la perte d’eau en raison des fuites, le faible débit de l’eau, etc.

Par ailleurs, l’accroissement démographique et l’extension de la ville vers la périphérie augmentent le besoin en eau de la population. De ce fait, les infrastructures existantes n’arrivent plus à satisfaire les besoins de la totalité de la population de la ville d’Antananarivo et ses environs.

L’envasement du lac de Mandroseza est également un sérieux problème à soulever. Les relevés bathymétriques effectués depuis 2000 permettent de mieux appréhender ce phénomène. En effet, ces derniers affichent une augmentation remarquable du niveau d’envasement. Si la profondeur maximale du Lac Mandroseza était de 7,37m en 2000, actuellement elle serait de l’ordre de 4,25m.

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Le processus d’érosion en amont du Lac a eu des répercussions importantes dans le processus de sédimentation. La turbidité de l’eau pourrait devenir de plus en plus chronique, à cause des multiples usages par les riverains sur l’Ikopa, d’Ambohimanambola jusqu’à Mandroseza.

Parmi les pratiques rencontrées le long de la rivière avant le déversoir de captage, on cite le lavage de voiture, la lessive, l’extraction de sable, l’agriculture, le pâturage, etc. Ces activités pourront fragiliser progressivement ainsi les berges, lesquelles s’accentuent en saison de pluie. En outre, les installations résidentielles aux alentours ont également leur rôle à jouer dans ce phénomène.

Bien que cette vitesse de sédimentation soit déjà modérée suite aux opérations de curage du lac entreprises déjà tous les ans, le niveau d’eau contenue dans le lac baisse au fil des années. Le graphique ci-après illustre cette diminution de la profondeur du lac Mandroseza de 2000 jusqu’en 2016.

profondeur_lac

Des mesures d’urgence à prendre ?

Comme première mesure, la mise en place d’un périmètre de protection immédiate du Lac Mandroseza s’avère indispensable afin de limiter toute forme d’urbanisation dans cette zone. L’application d’une telle mesure incombe aux responsables de la CUA et du ministère en charge de l’aménagement du territoire.

Par rapport à l’envasement du Lac Mandroseza, des mesures d’atténuation sont à appliquer immédiatement et elles sont de deux natures, lesquelles étant complémentaires : la première consiste à éliminer les dépôts au fur et à mesure de leur arrivée; d’un autre côté, on peut limiter leur arrivée, soit empêcher la formation des boues.

Un des meilleurs moyens de cette deuxième solution est d’établir des obstacles simples (exemple des petits barrages en gabions), au niveau du captage, afin d’y briser la force de ruissellement de l’eau. Une autre réponse est d’installer déjà à quelques kilomètres en amont du point de captage des séries de plages d’épandages, lesquelles vont retenir une bonne partie des sédiments entraînés par le courant d’eau. L’évacuation des sédiments semble assez dispendieuse, mais au stade actuel, il s’agit de la mesure la plus efficace pour réduire rapidement le niveau d’envasement.

Le reboisement constitue une autre alternative pour freiner l’érosion en amont, et ainsi pour retarder l’envasement.  L’effet du couvert végétal à Tsiazompaniry (reboisement après la création du barrage) a déjà contribué à une certaine stabilité des sols dans cette zone. Mais les faibles précipitations peuvent également être à l’origine de cette faible érosion.

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