Fort-dauphin, les grands changements de la dernière décennie

Fort-dauphin, les grands changements de la dernière décennie

Rio Tinto a commencé les travaux de construction de ses infrastructures à Fort-dauphin en 2005 en vue de l’extraction de l’ilménite et du zirsill à partir d’un gisement de sables minéralisés repartis sur trois secteurs (Mandena, Petriky et Saint Luce). L’exploitation du site Mandena a débuté en 2009 et la production complète a été observée en 2010.

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Ce billet tente de décrire de manière simplifiée les changements palpables que la ville de Fort-dauphin a connus pendant la dernière décennie, soit depuis l’implantation de ce grand investissement minier dans la région. D’emblée, je tiens à souligner qu’il ne s’agit en aucun cas d’un résultat d’une étude d’impact, ni d’une quelconque évaluation du projet minier QMM. Ce billet est issu tout simplement des observations personnelles durant mes nombreux passages dans cette ville notamment dans le cadre de la révision du PUDi de l’agglomération de Fort-dauphin à laquelle j’ai participé. Certains passages de ce billet sont d’ailleurs tirés de ce PUDi.

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Un secteur tertiaire en plein essor

Avant les années 2000, l’économie de Fort-dauphin s’était essentiellement basée sur les cultures de sisal et sur la production maritime (langoustes et poissons). Depuis 2005, force est de constater un revirement de la situation par le développement de manière exponentielle du secteur tertiaire aussi bien public que privé au détriment du secteur primaire.

La prolifération des petits commerces au détail et des services à la collectivité constitue une autre facette très visible exprimant cette transformation du système économique à Fort-dauphin. C’est le résultat de l’accroissement du marché de consommation, suite d’une part à  la croissance démographique urbaine et d’autre part à l’augmentation sans cesse des flux migratoires. Après le commerce, le secteur transport a également enregistré une prospérité sans précédent. Il y a d’un côté les besoins incessants en voiture pour transporter les touristes, mais par-dessus tout il a fallu répondre aux besoins de QMM et de ses importants fournisseurs qui ont représenté une clientèle considérable pour les loueurs de voitures tout-terrain notamment pendant la phase de construction de l’usine.

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Les changements s’observent aussi au niveau de la desserte urbaine. Si avant 2010, le taxi était le seul mode principal de transport de personnes dans la commune urbaine, Fort-dauphin dispose maintenant d’un réseau de transport collectif urbain (bus). La naissance de ce nouveau mode de transport urbain témoigne de la dynamique économique dans la ville et de la mobilité urbaine.

Boom de l’immobilier, mais les bidonvilles demeurent d’actualité

Parmi les principaux impacts du projet minier figure également en premier lieu le développement de l’immobilier. Le marché de la construction a littéralement explosé, et les quincailleries n’ont jamais été aussi nombreuses dans la ville de Fort-dauphin. En l’espace de quelques années seulement, Fort-dauphin a vu la naissance de nombreux bâtiments de prestige tels que les établissements hôteliers (Marina, Colbert, Le Port, …), les cités de QMM, et d’autres établissements privés et semi-privés (Banque, Caisse d’épargne, CNAPs, Assurances, etc.).

D’une manière générale, une inflation galopante des offres de logement a été observée, mais parallèlement l’on a également assisté à l’arrivée de plusieurs promoteurs immobiliers. Il en est de même pour les demandes en infrastructures touristiques. Sentant ce besoin, QMM a développé de nouveaux lotissements pour ses employés. Ainsi la dynamique de logement s’explique par les constructions des villages QMM à Ambinanibe, Ampamakiambato et à Amparihy.

La route de la Mine reliant l’usine de Mandena et le port Ehoala a été l’une des grandes infrastructures nouvellement construites dans la région grâce à QMM. Corollairement,  l’urbanisation de Fort-dauphin se poursuit vers cet axe routier, notamment vers Amparihy. Parmi les faits marquants figure la création d’un premier lotissement de standing à Lanirano avec 17 logements R+1. Initié par une société privée en immobilier, le lotissement comprend outre les villas, un terrain de tennis, un espace vert et une piscine (photo prise en 2012).

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Parallèlement, la mixité sociale dans l’habitat demeure très manifeste dans la ville de Fort Dauphin. Les quartiers offrent une diversité de types de logements mais la plupart d’entre eux montrent souvent un visage qui se caractérise par des constructions majoritairement faites en bois, et très collées entre elles. Dans certains quartiers toutefois, on constate des habitations individualisées et plus contemporaines. Bazaribe est de loin le quartier le plus structuré en matière d’agencement d’habitats. Son statut de quartier administratif et commercial lui confère cette description. Il abrite de nombreux bureaux administratifs, les établissements financiers, les boutiques et quincailliers, les locaux d’entreprise privée et ONGs, les écoles et centres religieux, les équipements sportifs, etc.

Le Port Ehoala, un nouveau poumon économique national

Autrefois, Fort-dauphin était appelé « comptoir étranger » à travers son ancien port d’exportation. Aujourd’hui, ce vieux port ne fonctionne plus, mais un autre grand port dénommé  Ehoala fait maintenant la nouvelle renommée de la ville grâce au projet QMM surtout mais aussi à l’appui financier d’autres bailleurs.

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Opérationnel depuis 2009, le Port Ehoala est considéré comme le facteur providentiel de développement durable de la Région Anosy, mais également de ses régions riveraines, à travers l’expansion de l’industrie minière et du tourisme.

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Le port est conçu non seulement pour permettre les activités d’exportation des productions de QMM mais en même temps l’importation et l’exportation de différentes productions régionales (fruits de mer, sisal, litchis, ferraille, pervenche de Madagascar, …), la relance du tourisme et le développement d’une zone industrielle.

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L’arrivée des bateaux de croisière

L’existence du port Ehoala a manifestement permis de croître les arrivées touristiques à Fort-dauphin grâce aux fréquentes escales des navires de croisière. Le tourisme est supposé l’un des facteurs de développement de la Commune et du District de Fort Dauphin ainsi que de la Région Anosy. La ville de Fort Dauphin en soi est une destination phare de séjours touristiques. On citera les belles plages, le vent pour les sports nautiques, etc. Parmi les sites les plus connus figurent les Plages de Libanona, de Lokaro, d’Ambinanikely et d’Ambinanibe qui se situent à proximité de la ville.

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Dans les banlieues de Fort-dauphin, les lieux d’excursion et de détente sont également nombreux dont le Pic Saint Louis, la Presqu’île Evatraha, la Réserve de Nahampoina, le     Jardin botanique Saiadi et la Cascade de Manantantely. Un peu plus loin, sur la route d’Amboasary Sud, cette Région bénéficie de l’attractivité touristique de plusieurs sites naturels écologiques dont principalement le Parc national d’Andohahela et la Réserve forestière privée de Berenty.

La Zone Economique Spéciale, un autre moyen pour booster l’économie régionale

A part le grand projet minier de QMM, l’industrie locale n’enregistre aucun changement majeur, en comparaison avec le secteur des services. L’industrie y gagnerait toutefois à se développer considérablement. Récemment, le gouvernement malgache a établi une mémorandum avec son homologue mauricien en vue de l’exploitation d’une Zone Economique Spéciale à Fort-dauphin. L’existence d’une telle zone devrait avoir des impacts conséquents entre autres sur le développement industriel et la création d’emploi au niveau régional mais surtout des retombées économiques apportées par la pleine exploitation du Port d’Ehoala.

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Il faut souligner qu’une zone de 440 ha située à proximité immédiate du Port d’Ehoala appelée Parc d’Ehoala (en violet sur la carte) est déjà inscrite dans le Plan d’Urbanisme Directeur de Fort-dauphin pour être aménagée en  zone d’activité mixte, et dont le schéma directeur a été approuvé en juillet 2011 auprès de plusieurs parties prenantes. Le Parc Ehoala sera une zone à vocation d’activités industrielles et autres, et le projet a été monté pour attirer les investisseurs régionaux et nationaux.

En plus de la mise en place de cette ZES, le potentiel du port doit également se conjuguer avec le développement d’autres facteurs dont particulièrement des améliorations majeures dans le système de transport terrestre régional. L’éventuelle fluidité des trafics sur les nationales 12 (vers l’axe Nord Est) et 13 (vers l’axe Nord Ouest) est une condition imparable pour que le Port Ehoala puisse assurer son rôle de catalyseur de développement régional.

Le revers de la médaille

On peut conclure que les effets du QMM et du Port Ehoala ont entraîné des changements positifs majeurs sur le plan économique dans la ville de Fort-dauphin. QMM a permis en outre de booster les PME, et ensuite à l’assainissement du secteur formel et du climat des affaires à Fort Dauphin.

Mais le revers de la médaille a été l’inflation qui s’est fait sentir dans l’agglomération. Si l’exploitation minière a surtout enchanté les investisseurs et capitalistes (hôteliers, loueurs de 4×4, restaurateurs, divers prestataires, etc.), les populations locales de l’agglomération ont pendant une période donnée souffert de cette inflation. A cela s’ajoutent des séries de mécontentements touchant le milieu environnemental et la sauvegarde sociale des populations délocalisées. Mais ces problèmes se sont déjà fortement atténués.

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Le coût de la vie a connu un rythme galopant durant une certaine période. A titre indicatif, le loyer a augmenté de 100%, voire plus pour les tarifs hôteliers durant les premières phases d’installation. Les prix des biens de consommation et de divers services ont généralement grimpé, mais les prix se sont ensuite stabilisés.

Par ailleurs, on remarque de manière générale que le secteur privé formel et industriel est largement dominé par les opérateurs étrangers. Ces derniers ont quasiment une mainmise sur les filières porteuses telles que le sisal, le tourisme, la filière langouste, l’industrie extractive, les bâtiments et la construction immobilière. Seule une poignée d’opérateurs nationaux intègrent la dimension régionale et nationale de leurs activités.

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