Antananarivo, la rebelle

Lalao Ravalomanana est donc élue Maire de la CUA après deux semaines de propagande pendant lesquelles les spectacles et caravanes de toutes sortes ont pris le dessus mettant au second plan les vrais débats d’idées et de programme sur le futur de la ville des Mille. Bizarrement, sur les neuf prétendants à la Mairie de la Capitale, la seule et unique candidate qui a refusé de participer aux deux débats organisés respectivement par le FES et par la Cenit a été choisie par la majorité des votants.

Un cinglant camouflet pour le HVM et une gifle pour Andry Rajoelina

C’était donc une confirmation de la popularité de Ravalomanana dans son fief. Tous les autres candidats doivent accepter le verdict des urnes. On peut toujours parler d’irrégularités, d’anomalies voire de tentatives de fraudes avant, pendant et après cette élection, mais il faut quand même savoir accepter une évidence. La différence des voix est tellement élevée que s’entêter à l’ignorer et à inventer encore des histoires d’illégalité de la candidature de Lalao Ravalomanana n’est qu’une preuve de malhonnêteté flagrante.

Comme première interprétation, Antananarivo a infligé une humiliation au parti HVM. Si le fait de subir le fameux vote sanction de Tanà est anodin pour un parti au pouvoir ou pour un candidat qu’il soutient, c’est la première fois dans l’histoire de notre république qu’un tel parti récolte un score aussi faible, tellement bas qu’on se demande si le parti avait réellement soutenu Rafalimanana dans cette élection.

Mais la vraie signification de cette victoire est une réponse de la majorité des Tananariviens à Andry Rajoelina et sa soi-disant révolution orange en 2009. Tanà a attendu ce moment depuis longtemps pour se venger de ceux qui ont clamé sur tous les toits durant plus de cinq années qu’il s’agissait de la révolte du peuple face à un tyran. La réussite de ce mouvement a bien sûr été facilitée par le comportement arrogant de Ravalomanana notamment face aux militaires et certains politiciens sans vergogne qui ne juraient que par une transition comme à leur habitude, mais de là à dire que ce n’était pas un coup d’Etat, il y a un pas à ne plus franchir et une vérité qu’on ne peut plus révoquer en doute.

A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire

Finalement, Lalao Ravalomanana a obtenu cette bataille électorale, sans trop de difficulté. Ses partisans devraient toutefois rester humbles et garder les pieds sur terre. Gagner une élection quel que soit le taux de participation mérite toujours d’être fêté, avec ou sans champagne, mais il faut éviter un excès de triomphalisme quand on sait que ce taux est le plus bas dans l’histoire des municipales à Tanà.

Je déplore particulièrement l’attitude de certains partisans du Tim qui ont visiblement eu du mal à expliquer le refus de leur candidate à prendre part au débat télévisé de la veille du jour de l’élection. Certains d’entre eux ont  mis en avant une stratégie de communication, ce qui n’est pas du tout absurde comme explication. Ils auraient même dû se contenter d’un tel argument au lieu de parler de débats stériles et inutiles. Avancer une telle ânerie, c’est prendre tous les telespectateurs pour des débiles, incapables de discernement. Leur championne est donc tellement intelligente que débattre avec les autres candidats serait vu comme une insulte à son endroit. Les Tananariviens peuvent ainsi espérer des résultats concrets de cette intelligence hors du commun d’ici la fin de son mandat.

Face aux deux Lalatiana qui n’ont jamais eu leur verve dans leurs poches, Lalao Ravalomanana ne s’en sortirait pas aussi facilement. Toutefois, nous savons également que le cœur de l’électorat tananarivien balance toujours vers ceux ou celles qui tiennent des propos moins virulents et plus respectueux, et rarement du côté des « méchants ». L’issue du débat aurait pu être davantage au bénéfice de la femme de Ravalomanana si elle avait été présente. Mais encore fallait-il avoir le courage de les affronter.

Apaisement avant tout

Quoi qu’il en soit, le temps est maintenant au travail. Antananarivo a besoin de tous ses enfants pour relever le défi urbain et pour changer radicalement le visage de cette cité que tout le monde prétend aimer. Le temps des manifestations de rues est révolu. Il en est de même pour les chamailleries entre le pouvoir central et la mairie d’Antananarivo, ayant empêché cette dernière d’assumer convenablement les fonctions qui lui incombent. Notre ville a trop souffert à cause de ces éternels conflits politiques. La plaie laissée par la dernière crise qui a été la plus longue et la plus destructrice de toutes celles que nous avions connues est encore loin d’être cicatrisée.

Félicitations donc aux élus de la Capitale, car il n’y a pas que le Maire, nous avons également voté pour les conseillers municipaux dont la cohabitation est encore une autre histoire à suivre.

2 réflexions au sujet de « Antananarivo, la rebelle »

  1. Mazava tsara ny tian’ny mpanoratra ho lazaina!

    Analyser la situation politique de Madagascar à partir de l’élection du maire de sa Capitale cependant me semble assez capillotracté même si cela peut apporter un éclairage certain (mais limité). Je sais que plusieurs personnes ne sont pas de cet avis et la discussion sur le sujet doit rester ouverte.

    Je ne pense pas non plus qu’une remise en cause des résultats serait honnête malgré un taux de participation historiquement bas, toutes élections confondues. Dura lex sed lex.

    Par contre le système actuel doit être questionner sur sa pertinence à répondre aux attentes de la population concernant ses relations avec les politiciens. En effet aujourd’hui la distance entre les élections qui nécessitent des moyens financiers astronomiques et la considération des intérêts des électeurs pendant l’exercice du pouvoir semble abyssale. Il faut ramener le système a son objectif premier : faire de la démocratie un système qui doit servir le peuple selon ses attentes.

    Soava

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  2. En fait, mon analyse est basée uniquement sur le cas de Tanà qui ne reflète évidemment pas la situation au niveau national du moins en ce qui concerne les résultats de ces élections communales. Je suis tout à fait d’accord sur le changement du système. Déjà, un Maire élu par seulement 15% des électeurs, de surcroît dans une grande ville comme Tanà qui compte 2 millions d’habitants, pose un grand problème de légitimité. Le risque d’instabilité plane toujours sur nos têtes.

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